Avancer seul ou ensemble? Le pouvoir des partenariats dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.
Une Cambodgienne, une Ougandaise et un Américain unissent leurs forces sur Zoom pour écrire sur le démantèlement du patriarcat. Cela paraît improbable, mais c’est pourtant la preuve du pouvoir de la collaboration dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.
Les violences contre les femmes et les filles touchent une femme sur trois au cours de sa vie. Malheureusement, la pandémie de Covid-19 n’a fait qu’exacerber le problème: beaucoup de femmes et de filles ont été forcées de se confiner avec leur agresseur. Dans le même temps, les services d’assistance aux victimes étaient perturbés ou inaccessibles.
Chacun d’entre nous connaît l’ampleur du phénomène. Nous avons consacré nos carrières à traiter de la violence patriarcale. En tant que militants sur le terrain, nous savons qu’il est parfois nécessaire d’agir rapidement pour limiter les dégâts. Mais nous savons également que mettre un terme aux violences faites aux femmes et aux filles nécessitera un mouvement global.
En décembre dernier, dans le cadre des 16 Jours d’activisme contre la violence basée sur le genre (#16Days), nous nous sommes réunis avec d’autres organisations partenaires locales dirigées par des femmes au sein du Learning Lab de WomenStrong International (WSI). Notre objectif : prendre des mesures dans seize pays.
Voici ce que nous avons appris :
La collaboration est possible malgré les différences géographiques, temporelles, linguistiques, culturelles et de genre.
Lors de notre Peer Learning Forum organisé par WomenStrong à l’automne 2021, plusieurs partenaires du Learning Lab ont proposé d’unir nos forces autour d’une initiative collective. La tâche paraissait immense, mais l’énergie du groupe était palpable. WomenStrong a apporté son aide, ses infrastructures et ses encouragements.
Les partenaires ont rapidement désigné deux co-présidents pour gérer le processus et parvenir à des avancées concrètes. À peine quelques semaines plus tard, les dix-huit partenaires se sont mobilisés autour du besoin essentiel d’impliquer les hommes et les garçons dans la lutte contre les violences faites aux femmes dans le cadre de la campagne mondiale #16Days. Rapidement, nous avons organisé et lancé un événement Facebook Live multilingue, ainsi que des recommandations et une campagne sur les réseaux sociaux. La collaboration a décuplé la puissance du lancement et offert une nouvelle opportunité d’apprentissage, en plus d’être positive pour le moral de tous.
Cette action collective a été un sommet pour moi en 2021 sur le plan professionnel et j’en ressens encore l’élan positif en 2022.
-Eng Chandy, directrice executive, Gender and Development for Cambodia
La justice linguistique doit être la priorit
Aucune collaboration n’est possible sans donner la priorité à l’équité, à l’accessibilité et à l’opportunité. La langue peut être un obstacle à la participation, excluant des voix et des points de vue importants. WomenStrong International soutient la justice linguistique à travers la traduction et l’interprétation des activités du Learning Lab. Les partenaires, eux aussi, prennent part activement à cet effort. Par exemple, ceux qui parlent deux langues ou plus ont conseillé et relu le travail de traducteurs professionnels afin que nos productions #16Days soient plus nuancées, authentiques et accessibles pour les différentes communautés locales.
En mettant l’accent sur la justice linguistique lors de notre travail collectif dans le cadre des 16 Jours d’activisme (#16Days), nous avons pu entendre les idées et les perspectives de toutes les organisations partenaires. En retour, chacune a pu soumettre ses idées et dialoguer à travers toutes les activités des #16Days.
Le rôle de la communauté est essentiel dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.
La communauté est une source d’apprentissage collectif au sein d’une initiative partagée. Via les Learning Labs de WomenStrong, nous interagissons et échangeons comme une communauté, en apprenant de manière à la fois officielle et officieuse. Nous menons des activités telles que des retraites, des webinaires et des discussions informelles pour construire les fondements d’une unité. Nous nous appuyons mutuellement sur nos compétences, notre expertise et nos connaissances par le biais d’échanges et d’un apprentissage réciproque. Ceci nous permet de partager des stratégies, des compétences techniques et des connaissances avec nos pairs.
Nous ne pouvons grandir qu’en nous ouvrant à la communauté et en nous soutenant mutuellement. C’est ce qui nous aide à réfléchir et à remettre en question nos propres biais lorsque nous traitons de problématiques importantes, telles que la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.
Monica Nyiraguhabwa, directrice exécutive de Girl Up Initiative Uganda
La puissance de la formation de cette communauté, de l’apprentissage collectif et du partage de compétences a eu son importance dans les activités de notre campagne #16Days. Lorsque les partenaires ont décidé qu’une vidéo sur les engagements des hommes pourrait inspirer d’autres hommes à s’impliquer dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, nos camarades de Girl Up Initiative Uganda, plus doués en montage vidéo, se sont chargés de la créer. Lorsque nous avons cherché un modérateur à l’aise avec les événements en direct, la directrice exécutive de Girl Up a gracieusement offert son expertise. Et, lorsque l’un d’entre nous a exprimé ses doutes sur notre capacité à créer un outil collectif pour impliquer les hommes et les garçons, notre collègue Paola Saldivias, de Visionaria Network Peru, a répondu : “Ne vous inquiétez pas ! Vous faites partie d’une communauté. Nous vous aiderons!“
Bien entendu, solidarité ne veut pas dire uniformité. Tous les partenaires n’ont pas participé à toutes les activités. Certains ont fourni des citations pour les réseaux sociaux, d’autres ont recruté des hommes pour la vidéo et d’autres encore ont partagé l’événement Facebook Live ou les recommandations sur leurs réseaux sociaux. Tout le monde n’a pas tout fait, et ce n’était pas le but. En revanche, nous nous sommes tous engagés en faveur d’un objectif commun – en finir avec les violences faites aux femmes et aux filles – et pour des relations de confiance entre les partenaires. Telle est la force de la communauté : chaque partenaire a fait ce qu’il pouvait en fonction de sa situation actuelle.
Mettre fin aux violences faites aux femmes et aux filles n’est pas un sprint, mais un marathon. Et la distance à parcourir reste grande. À travers nos partenariats et notre effort collectif récent, nous avons appris que la collaboration occupe une place centrale dans cette tâche. C’est grâce à ces efforts que nous avons approfondi notre sens de la communauté et que des approches peuvent être élaborées et appliquées pour en finir enfin avec les violences contre les femmes et les filles.
Rejoignez-nous! “Marchons ensemble.”
Co-auteurs
Charity Namara, conseillère technique WomenStrong International – Renforcement des capacités (Kampala, Ouganda)
Greg Loughlin, consultant, anciennement avec Men Stopping Violence (Atlanta, Géorgie aux États-Unis)
Eng Chandy, directrice executive, Gender and Development for Cambodia (GADC)